lundi 30 juillet 2007

Droits de l'Homme : entre service minimum et coups de pub

Le 5 juillet dernier un homme est lapidé en Iran pour adultère. La femme concernée attend son exécution.

Le 20 juillet je m'étonne dans mon tout nouveau blog du silence du gouvernement français, alors que de nombreux pays et institutions ont fait connaître leur émotion.

Le 27 juillet, le porte-parole du Quai d'Orsay annonce dans sa conférence de presse habituelle que le chargé d'affaires iranien a été convoqué au ministère "à la demande de Mme Rama Yade, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères et aux droits de l'homme" pour se voir notifier "l'extrême préoccupation" du gouvernement français à la suite de diverses exécutions en Iran : douze pendaisons le 22 juillet, s'ajoutant à une lapidation pour adultère.

Voilà donc le cas traité dans une protestation "omnibus", émise auprès d'un diplomate iranien qui n'est même pas l'ambassadeur, et non par Mme Yade elle-même, la chose n'étant sans doute pas de son niveau, mais par un fonctionnaire français d'un rang non révélé, mais que l'on peut présumer modeste. C'est ce qu'on appelle en diplomatie une démarche de routine. Et en bon français un service minimum.

Quelques jours avant, deux journalistes iraniens avaient été condamnés à mort pour "espionnage", mais de cela, le Quai d'Orsay, sans doute mal informé, n'a même pas parlé.

L'on a du mal, après cela, à prendre au sérieux les déclarations de Mme Yade, fort sympathique au demeurant, faites à la presse française le 24 juillet: "Je veux que, sur le terrain des Droits de l'Homme, chacun sache que la France est de retour. Qu'elle n'a jamais cessé d'être la patrie des Droits de l'Homme... Si je parviens à faire en sorte que les Droits de l'Homme soient au cœur de notre diplomatie, j'aurai rempli ma mission."

Si la France est de retour, disons, pour être charitable, qu'elle revient sur la pointe des pieds.

Enfin, il y a une brillante exception à cette discrétion: l'affaire libyenne!

Lisons à nouveau Mme Yade dans une déclaration à ce sujet: "Aujourd'hui, la libération des infirmières et du médecin bulgares est une victoire des Droits de l'Homme. Les négociations ont été dures, et leur libération jusqu'au bout incertaine, mais l'important est qu'ils soient enfin libres.

Le rôle essentiel de la France dans cette libération, par l'action courageuse et sans relâche de Cécilia et Nicolas Sarkozy, rappelle que la France, berceau des Droits de l'Homme, a plus que n'importe quel autre pays un devoir en matière de défense des droits fondamentaux."

Ah! qu'en termes galants ces choses-là sont dites! "L'action courageuse et sans relâche" du Président de la République et de son épouse a été, chacun le sait, de brève durée, et tout à fait subsidiaire dans cette libération, où l'Union européenne (incarnée en ce cas par Mme Benita Ferrero-Waldner), et non la France, a joué "le rôle essentiel". L'envoi d'un avion de la République française pour ramener les otages, et les risettes prodiguées au colonel Khadafi ne changent rien à l'affaire.

Non, Monsieur le Président de la République, non, Madame Sarkozy, il n'est pas décent d'instrumentaliser ainsi la cause des Droits de l'Homme au profit de votre image personnelle et du tirage des magazine "people".

Non, Madame le Secrétaire d'Etat, nous ne pouvons qu'être mal à l'aise de vous voir ainsi encenser vos supérieurs dans le plus pur style du culte de la personnalité. Les droits de l'homme méritent un autre langage que celui de la flatterie et de l'auto-satisfaction.

La France, patrie des Droits de l'Homme? c'est une démonstration qui doit être faite tous les jours, sur notre propre sol comme à travers le monde, par un travail opiniâtre, ingrat, souvent obscur, et pas simplement par un bon coup de pub!

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